L’Association Claude et Felix Lanzmann (A.C.F.L.), présidée par Dominique Lanzmann, veuve du réalisateur, annonce l’inscription de Shoah (1985), film-monument du réalisateur français Claude Lanzmann, au registre de la Mémoire du Monde de l’UNESCO.
Shoah, le mot hébreu pour "Catastrophe", désigne l'extermination de six millions de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Le terme « la Shoah » est utilisé depuis 1948 en Israël et depuis la sortie du film de Claude Lanzmann en 1985 en Europe, alors qu'aux États-Unis est employé le mot "Holocauste".
Les Commissions Nationales françaises et allemandes de l’UNESCO avaient proposé conjointement la candidature de Shoah à la Mémoire du Monde. L’ACFL porte la candidature pour la France et le Musée Juif de Berlin pour l’Allemagne, choisi par l’ACFL car dépositaire des archives sonores préparatoires de Shoah.
Shoah rejoint ainsi au patrimoine cinématographique de la Mémoire du monde, les archives des Frères Lumière, Metropolis de Fritz Lang, Los Olvidados de Luis Buñuel, et tout Bergman. Œuvre primordiale de l’histoire orale, Shoah rejoint aussi Le Journal d’Anne Frank, les archives du ghetto de Varsovie, celles du procès d’Auschwitz et la collection de témoignages de Yad Vashem. L’Histoire retient très peu de choses des siècles. Le XXème siècle est le siècle de la Shoah, c’est aussi le siècle du Cinéma. L’inscription à la mémoire du monde de l’UNESCO confirme la place unique de ce chef-d’œuvre entre art et histoire.
Avec Shoah, Claude Lanzmann libère la parole des revenants des camps. Il débusque et fait parler les témoins au plus près de la machine de mort : les Sonderkommandos ou juifs du travail, esclaves assignés aux chambres à gaz et aux fours, les habitants polonais jouxtant les centres de mise à mort, et les nazis eux-mêmes qu’il réussit à faire parler et à filmer avec une caméra cachée.
Le réalisateur français invente une nouvelle forme de cinéma, ni documentaire, ni fiction. Il met en scène, à partir du rien ou du presque rien qui reste, investit magnifiquement les paysages et confronte des témoins aux lieux du crime.
« Je n'aurais imaginé une pareille alliance de l'horreur et de la beauté. Certes, l'une ne sert pas à masquer l'autre, il ne s'agit pas d'esthétisme : au contraire, elle la met en lumière avec tant d'invention et de rigueur que nous avons conscience de contempler une grande œuvre. Un pur chef-d’œuvre. » Simone de Beauvoir à propos de Shoah.
Shoah, c’est neuf heures vingt-six minutes de film, deux cent vingt heures de pellicules conservées à l’USHMM (United States Holocaust Memorial Museum) de Washington et tout autant d’interviews audio, conservées au Jewish Museum Berlin, Musée Juif de Berlin, institution choisie par l’ACFL : un symbole fort de l’amitié franco-allemande pour laquelle Claude Lanzmann a œuvré dès 1947.
Après avoir organisé en partenariat avec l’Éducation Nationale la diffusion d’extraits de Shoah dans les classes de lycées de France, l’ACFL compte sur l’UNESCO pour pouvoir étendre son travail à l’échelle mondiale. En effet, Shoah peut transmettre à toute personne de plus de 12 ans, le savoir sur la plus grande atrocité du XXème siècle, et transforme le spectateur en témoin responsable à son tour de la transmission de l’événement.
À ce titre, du 6 novembre au 20 décembre 2023, Shoah et toute l’œuvre cinéma de Claude Lanzmann feront l’objet d'une rétrospective intégrale à la Bibliothèque Publique d’Information du Centre Pompidou, en amont du centenaire de la naissance de Claude Lanzmann, des 40 ans de la sortie de Shoah et des 80 ans de la libération des camps en 2025.