Tout débute en 1987, Itzhak Rabin, alors Ministre de la Défense, demande à Lanzmann, après avoir vu Shoah, de réaliser un film sur la guerre d’Indépendance. Lanzmann refuse : «Il y a en effet deux récits possibles de cette guerre, le récit israélien et le récit arabe. Il n’est pas possible d’entrer dans les raisons des deux camps à la fois, sauf à faire du très mauvais cinéma.» Lanzmann propose en contrepartie à Rabin un film sur « la réappropriation de la force et de la violence par les Juifs d’Israël.» Le Ministre de la Défense accepte et répond à Lanzmann: «Nous n’avons pas un shekel à vous offrir, mais je mets l’armée à votre disposition, on ne vous cachera rien, elle vous ouvrira ses secrets.»
Commence alors pour Lanzmann une grande épopée militaire. Alors âgé de 67 ans, le réalisateur se fait soldat, il embarque à bord d’avions de chasse Phantom et F16 supportant jusqu'à 7G. Il pilote des chars Merkavas, prend part à des manœuvres combinées en plein désert, 48 heures sans interruption…
Lanzmann fait alors le portrait d’une armée pas comme les autres, il comprend le singulier courage de la fatalité, non pas uniquement de la survie des hommes, mais celle de toute une nation nourrie par « la peur de l’annihilation ».
Dans ses mémoires, Lanzmann résume cette pensée en citant Salmen Lewental, commando de Tsahal : «La vérité, a-t-il écrit, est qu’on veut vivre à n’importe quel prix, on veut vivre parce qu’on vit, parce que le monde entier vit. Il n’y a que la vie… » On comprend avec Tsahal, que les jeunes soldats israéliens n’ont « ni la violence dans le sang ni le privilège accordé à la vie, qui fait de sa sauvegarde un principe fondateur et explique les tactiques militaires spécifiques propres à cette armée et à nulle autre.»